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Gisèle Dispas est tombée amoureuse de Marseille et ses Calanques. Elle nous partage son expérience de baliseuse au sein du groupe des excursionnistes marseillais qui forment aujourd’hui sa famille d’adoption. Tous les mardis, ils sillonnent les massifs pour entretenir les sentiers et échanger avec les visiteurs.

Portrait par Éric Lenglemetz, recueil du témoignage par Noëlie Pansiot.

Coup de cœur pour Marseille et ses Calanques

J'ai 69 ans, je suis retraitée, et je suis à Marseille depuis 2009. Mais je suis vraiment devenue Marseillaise en 2013, avec l'année européenne de la culture. Ça a été un chamboulement dans ma vie ; j'étais à une année de la retraite et je me disais « Qu'est-ce que je fais ? Je reste ici ? » Je me suis donné une année pour réfléchir. Et là, 2013 est arrivée avec un feu d'artifice d'événements plus beaux les uns que les autres.

Je suis déracinée par rapport à quelqu'un qui a toujours habité sur Marseille, mais lui, il reste sur un acquis et il ne va voir peut-être que les désagréments. Alors que moi j'arrive, je demande à voir. Et tous ceux qui ont découvert Marseille comme moi, eh bien, ils se sont donné la peine de chercher, de fouiller et de voir. J'ai découvert des endroits, je me suis baladée, j'ai arpenté Marseille, j'ai aimé les Marseillais avec leur diversité. J'ai appris à connaître Marseille et je défends Marseille.

J'ai aussi voulu connaître un peu les Calanques donc je suis rentrée dans l'association des excursionnistes marseillais. Au cours d'une randonnée, quelqu'un nous a présenté le balisage et je me suis inscrite. Et là, ça a été mon deuxième coup de cœur : les Calanques.

Et maintenant, quand mes enfants me disent « Viens vivre avec nous », je dis « Non, que les choses soient claires, je suis bien là où je suis ! » Je veux profiter et les Calanques, c'est mon territoire. C'est un lieu unique, on a des paysages avec ces roches déchiquetées qui sont par moments trouées avec la vue sur la mer et les îles. Parce que les îles apportent quelque chose ; moi, je suis niçoise, vous avez la baie des Anges, mais vous n’avez rien devant, alors que là, on voit la mer, l'île de Riou, l'île Plane, et ça amène un relief supplémentaire.

Adoptée par la famille des baliseurs

La Fédération française de randonnée pédestre (FFRP) est l’association qui gère tous les baliseurs du département. En ce qui concerne les Calanques, on a deux équipes chapeautées par les Excursionnistes Marseillais. Le grand massif des Calanques a été divisé en deux secteurs et moi, je travaille dans le secteur qui va de Sormiou jusqu'à Cassis.

Quand j'ai intégré cette équipe, je ne connaissais pas les Calanques, je ne connaissais pas le métier de baliseur, ils m'ont tout appris. Je suis tombée dans une équipe extraordinaire, parce qu'il y avait des gens de tout âge. Les anciens nous ont transmis leur savoir, ils nous ont partagés des anecdotes ; ils n'avaient pas besoin de cartes, non, ils avaient tout dans la tête et ils aimaient les Calanques. C'est devenu, pour moi, une famille.

C'est vraiment des gens simples, qui aiment les Calanques, qui parlent avec beaucoup de bienveillance et on s'entend très bien parce qu'on forme toujours la même équipe, tous les mardis.

On travaille dur, parce que le sol est difficile, on a tous les articulations un peu abîmées. Mais quand on a fini la journée de balisage, on se dit qu’on sait pourquoi on est fatigué : parce qu’on a fait du bon travail ; et on a passé une excellente journée parce qu’on a eu des échanges avec les amis, les randonneurs.

Cette année, on a balisé 32 kilomètres. En une séance, on va faire un kilomètre seulement, parce qu'on va débroussailler, agrandir les sentiers, boucharder pour enlever les anciennes peintures et en faire d'autres, on va essayer de canaliser la circulation des promeneurs. Donc on ne fait pas beaucoup de distance.

C'est physique parce que bon, la terre est basse et pour ouvrir les sentiers, il faut couper. Donc il y a ceux qui coupent, ceux qui vont débarrasser avec une houe pour aménager des marches. On va essayer par moment de mettre des bourrelets, c'est-à-dire de mettre des pierres pour bien orienter les promeneurs. Il faut se pencher, s'asseoir, remonter et repartir avec le sac à dos, les outils, le pique-nique.

Les Calanques, un lieu d’échanges et de partage à préserver

Par moments, on est la vitrine du Parc : les gens qui randonnent nous remercient ou nous posent des questions. Ils nous demandent les itinéraires pour se rendre à tel ou tel endroit. Donc nous, systématiquement, on s’arrête, on sort notre carte ou on leur montre l'application "Mes Calanques" et on les conseille. Au passage, on leur demande d’où ils viennent, c’est un échange dans les deux sens, c'est vraiment un moment de partage.

On essaye de canaliser les gens sur les sentiers, mais on ne peut leur interdire de passer à côté. Par exemple, vous prenez le sentier des treize contours, à un moment donné, on a balisé un sentier mais il est difficile, il y en a qui vont préférer prendre une partie des éboulis. Sauf qu’en passant par les éboulis, ils vont abîmer la nature.

Donc on essaye de faire passer les messages, on essaye d'éduquer les personnes à respecter le milieu. Ce que j'ai beaucoup apprécié quand je suis arrivé dans les Calanques, c'est de voir des familles entières avec les petits ; tout le monde partait dans les calanques. Les Marseillais aiment leurs Calanques. Il n'y a pas que les retraités qui aiment marcher, il y a aussi les jeunes, ceux qui font l'escalade, ceux qui font la marche nordique. Il y a des classes entières qui viennent pour faire des sorties pédagogiques, des courses d’orientation.

Pour moi, les Calanques, c'est une histoire d'échanges entre les différentes générations, elles appartiennent à tout le monde et on a plaisir à y aller et à échanger.


Source URL: https://www3.calanques-parcnational.fr/des-connaissances/culture-et-patrimoine/paroles-et-visages-des-calanques/gisele-dispas